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La privatisation des retraites est un élément fondamental de la restructuration néolibérale encouragée par la Banque mondiale, le FMI, l’OCDE, les banques de développement interaméricaine, africaine et asiatique, USAID et les entreprises de services financiers, qui en tirent le plus de profit. Par ailleurs, comme dans de nombreux cas de privatisation, le Chili fut le premier pays à privatiser les régimes de retraites en 1981, sous le pouvoir du dictateur militaire Augusto Pinochet, soutenu par les États-Unis.
Rosa Pavanelli, la Secrétaire générale de l’ISP, déclare :
« Je tiens à féliciter Isabel Ortiz, Fabio Durán et leur équipe, à l’OIT, pour ce livre. Il montre sans complaisance l’hypocrisie de la privatisation des retraites qui a, schématiquement, institutionnalisé le vol du salaire des travailleurs. Cet ouvrage laisse entrevoir la faillite morale des néolibéraux, qui savaient exactement ce qu’ils faisaient. On ne peut qu’être indigné en lisant les conclusions. Mais on peut également espérer que le bon sens l’emportera et que les pays qui ont encore des régimes de retraites privatisés les feront revenir dans le giron public – comme cela se produit de plus en plus fréquemment dans les secteurs de l’eau, de l’énergie, du transport, de la santé et d’autres services publics essentiels ».
« Cette publication fait apparaître un autre aspect qu’il convient de souligner : lorsque les travailleurs ne sont pas impliqués aux décisions, nous pouvons être sûrs que leurs intérêts ne seront pas protégés. La participation des travailleurs et des syndicats est indispensable, et notre rôle est de veiller à ce que les gouvernements et les agences internationales respectent notre légitimité, en particulier en ce qui concerne des questions aussi fondamentales que la protection sociale et la retraite ».
Les enseignements que l’ISP tire de cette expérience s’inscrivent dans la même logique que les expériences de privatisation dans d’autres secteurs :
Pour les syndicats des services publics, les enseignements à retenir sont tout aussi importants :
Synthèse
De 1981 à 2014, trente pays ont privatisé complètement ou partiellement leurs régimes publics obligatoires de retraites. Parmi ces pays, quatorze se trouvaient en Amérique latine (dans l’ordre chronologique : Chili, Pérou, Argentine, Colombie, Uruguay, Bolivie, Mexique, Venezuela, Le Salvador, Nicaragua, Costa Rica, Équateur, République dominicaine et Panama), quatorze en Europe de l’Est et dans l’ex-Union soviétique (Hongrie, Kazakhstan, Croatie, Pologne, Lettonie, Bulgarie, Estonie, Fédération de Russie, Lituanie, Roumanie, Slovaquie, Macédoine, République tchèque et Arménie), et deux en Afrique (Nigeria et Ghana). La plupart de ces privatisations étaient soutenues par la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (FMI), l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), USAID et les banques de développement asiatique ou interaméricaine, en dépit de l’avis défavorable de l’OIT.
En 2018, dix-huit pays ont procédé à une nouvelle réforme pour inverser, complètement ou partiellement, la privatisation des régimes de retraites : République bolivarienne du Venezuela (2000), Équateur (2002), Nicaragua (2005), Bulgarie (2007), Argentine (2008), Slovaquie (2008), Estonie, Lettonie et Lituanie (2009), État plurinational de Bolivie (2009), Hongrie (2010), Croatie et Macédoine (2011), Pologne (2011), Fédération de Russie (2012), Kazakhstan (2013), République tchèque (2016) et Roumanie (2017). La grande majorité de ces pays se sont détournés de la privatisation après la crise financière mondiale de 2007-2008, lorsque les inconvénients du régime privé sont devenus évidents et qu’il est apparu nécessaire de remédier au problème.
Constatant que 60% des pays qui avaient privatisé leurs régimes publics obligatoires de retraites faisaient machine arrière, et face à l’accumulation de preuves de l’incidence négative de la privatisation des retraites aux niveaux économique et social, on peut affirmer que l’expérience de la privatisation est un échec. La privatisation des retraites n’a pas donné les résultats escomptés. Les taux de couverture ont stagné ou diminué, les allocations de retraite ont baissé et les inégalités de genre et de revenus se sont aggravées, ce qui a rendu la privatisation extrêmement impopulaire. Le risque de fluctuations des marchés financiers s’est déplacé sur les particuliers. Les frais administratifs ont augmenté, ce qui a réduit les allocations de retraite. Les coûts élevés de la transition – souvent sous-estimés – ont créé d’importantes pressions budgétaires. La gestion privée devait améliorer la gouvernance mais elle l’a au contraire affaiblie. La participation des travailleurs à la gestion des retraites a été éliminée. Dans de nombreux cas, les fonctions réglementaires et de contrôle sont passées sous le joug des groupes économiques qui étaient chargés d’administrer les caisses de retraite, ce qui a créé un grave conflit d’intérêt. En outre, le secteur privé des assurances, qui tire essentiellement profit de l’épargne des citoyens, s’oriente vers une plus forte concentration. Enfin, les réformes des retraites ont eu des effets limités sur les marchés financiers et la croissance, dans la plupart des pays en développement.
La publication passe ensuite en revue les principales expériences relatives aux nouvelles réformes des retraites, la manière dont les pays reviennent sur la privatisation des retraites, les lois adoptées, les caractéristiques fondamentales du nouveau modèle public, les nouveaux droits, le rétablissement d’un administrateur public des retraites, le transfert des membres et des fonds, la reconnaissance des droits passés, le financement et les nouveaux taux de cotisation, la collecte des cotisations et la gestion des fonds, les changements au niveau du contrôle et de la réglementation, la gouvernance et la représentation des employeurs et des travailleurs, le dialogue social. Il faudra plusieurs années pour finaliser l’inversion de la privatisation des régimes de retraite, mais on peut d’ores et déjà observer des améliorations claires et mesurables et des impacts positifs, notamment la réduction des pressions budgétaires, la baisse des coûts administratifs, de meilleurs niveaux de couverture et d’allocations de retraite, le recul des inégalités entre hommes et femmes et des inégalités de revenus.
Il est possible d’inverser rapidement la privatisation des retraites, en quelques mois seulement. Pour remettre en place des régimes publics de retraites, les pays doivent prendre onze mesures politiques principales : (i) engager le dialogue social pour obtenir un consensus et lancer des campagnes de communication ; (ii) former un comité tripartite technique chargé de la réforme, qui définira et mettra en œuvre le processus de renationalisation du régime de retraites ; (iii) faire passer une/des loi(s) en adoptant les caractéristiques principales du régime de retraites par répartition, conformément aux normes de l’OIT relatives à la sécurité sociale ; (iv) créer une institution publique de retraite/désigner un administrateur qui assurera une gouvernance tripartite ; (v) transférer les membres du régime privé vers le régime public ; (vi) transférer les ressources accumulées sur les comptes individuels ; (vii) fixer de nouveaux taux de cotisation et commencer à collecter les cotisations pour le nouveau régime public de retraites ; (viii) clôturer le système de collecte des cotisations du régime privé ; (ix) mettre en place des services d’inspection et des mécanismes chargés de contrôler le versement des cotisations ; (x) instaurer l’unité ou l’entité responsable de la gestion des investissements du régime public de retraites ; (xi) clôturer l’organe de contrôle et de réglementation des retraites du secteur privé.
Cette publication et les études de cas de pays qui y sont présentées mettent en évidence les résultats peu satisfaisants des retraites obligatoires du secteur privé, et peuvent apporter des enseignements utiles aux gouvernements désireux d’améliorer leurs régimes de retraites nationaux. Le renforcement des assurances sociales publiques, conjugué aux retraites de solidarité non contributives, comme le préconisent les normes de l’OIT, a amélioré la pérennité financière des régimes de retraites, rendu les droits à la retraite plus solides et plus prévisibles, ce qui a permis aux citoyens âgés de mieux profiter de leur retraite. La responsabilité des États de garantir la sécurité de revenu aux personnes âgées est indissociable du renforcement des régimes publics de retraite.
Cet ouvrage démontre le manque d’efficacité des retraites obligatoires du secteur privé dans quinze pays et, plus précisément :
Les différents chapitres de la publication sont également disponibles sous forme de documents de travail :
[i] Les pays qui n’ont pas encore inversé la privatisation des retraites sont les suivants : Chili, Pérou, Colombie, Uruguay, Mexique, Le Salvador, Costa Rica, République dominicaine, Panama, Arménie, Nigeria et Ghana.