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Fonctionnaire au Portugal, femme de ménage en Suisse

21 Septembre 2012
Alors que les manifestations contre les mesures d'austérité s'étendent au sud de l'Europe, de plus en plus de personnes frappées par la crise migrent vers le nord, à la recherche d'un travail décent. Cette tendance touche même désormais les fonctionnaires.

(OIT Info) – Nous l'appellerons Ana B. Nous rencontrons cette Portugaise d'une cinquantaine d'années d’une grande ville de Suisse. Ana vit en Suisse depuis six mois environ pour exercer un nouveau métier, de femme de ménage et de gardienne.

Le Portugal est l'un des pays qui souffre le plus des mesures de rigueur,» dit Daniel Vaughan-Whitehead, économiste à l'OIT.

Cependant, Ana n'est pas une femme de ménage ordinaire. En fait, elle est secrétaire dans un service public de la ville de Porto, au Portugal, et a pris une année sabbatique pour venir en Suisse – à la recherche d’un travail lui permettant de régler ses factures.

«Je suis mère célibataire et mon fils de 20 ans est encore à l'université. Je rembourse toujours l'appartement que j'ai acheté à la périphérie de Porto il y a quelques années. Au Portugal, mon salaire de fonctionnaire n'est que de 700 € par mois. Mais avec la crise économique et les mesures d'austérité qu'elle a entraînées, les salaires ont été gelés...»

C'est pourquoi quand un ami portugais vivant en Suisse lui a parlé de la possibilité d’obtenir un emploi de femme de ménage en Suisse, elle s'est rendue compte qu'elle ferait plus que doubler son salaire en acceptant cette offre.

«Comme la possibilité de prendre une année de disponibilité est l'un des “avantages” que l'administration pour laquelle je travaille n'a pas encore supprimé, j'ai décidé d'y aller pour toucher un salaire décent, même si cela ne dure qu'une année», explique-t-elle.

Ana confie que son pays lui manque et regrette de ne pas pouvoir voir son fils. «Grâce à internet, nous restons en contact presque chaque soir», dit-elle.

Pour épargner davantage sur ce qu'elle gagne, elle a décidé de loger dans un foyer essentiellement occupé par des jeunes: «A 50 ans, j'aimerais mieux rester à la maison au Portugal. Mais je veux que mon fils puisse obtenir son diplôme universitaire ... même si cela veut dire de renoncer en partie à mon statut social», explique-t-elle.

Les employés du secteur public frappés par l'austérité
L'histoire d'Ana n'est certainement pas un cas isolé. Mais elle s'en tire probablement mieux que ceux qui ont dû s'expatrier parce qu'ils n'avaient pas d'emploi du tout.

Sa décision de quitter le Portugal montre toutefois que même les fonctionnaires et les classes moyennes sont de plus en plus touchés par la crise. «L'histoire d'Ana illustre en partie les difficultés grandissantes que doivent affronter les fonctionnaires depuis le début de la crise», explique Daniel Vaughan-Whitehead, économiste principal à l’OIT, qui travaille actuellement à un ouvrage consacré aux répercussions de la crise sur les travailleurs du secteur public.

"Les travailleurs du secteur public subissent le gel des salaires, les suppressions d'allocations, le manque de perspectives de carrière," dit D. Vaughan-Whitehead.

«La plupart d'entre eux – en particulier dans le sud et l'est de l'Europe – doivent gérer le gel des salaires, les suppressions d'allocations, le manque de perspectives de carrière. Le Portugal est l'un des pays qui souffre le plus des mesures de rigueur», ajoute-t-il.

«La pauvreté au travail dans le secteur public est un phénomène nouveau en Europe», constate-t-il.

Daniel Vaughan-Whitehead explique aussi comment la détérioration des conditions de travail (intensification du travail, plus d'heures supplémentaires pour des salaires réduits, etc.) conduit à un grave recul de la qualité des services publics. Il attribue cette tendance aux pénuries de personnel provoquées par l'absence de nouvelles recrues – alors que la demande de prestations a au contraire augmenté.

«Cela incite aussi les gens à se tourner vers des solutions alternatives qui sont difficiles à trouver parce que le secteur privé ne recrute plus. Les femmes sont particulièrement touchées.»

Dans six mois environ, Ana devra quitter la Suisse pour retrouver son ancien emploi au Portugal.

Mais elle est déjà en train de vérifier si elle peut prolonger d'une année sa mise en disponibilité. Elle conclut: «Si avoir suffisamment d'argent pour vivre nécessite de travailler comme femme de ménage ici plutôt que comme secrétaire dans un bureau confortable, je suis prête à le faire une année supplémentaire.»

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