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Le gouvernement sape la santé publique au nom d'intérêts privés au Brésil

09 Juin 2017
Health workers protest in Brazil
Le constat selon lequel le service de santé national (Sistema Único de Saúde – SUS) s'effrite à mesure que les sociétés privées s'imposent dans ce secteur est choquant, mais reflète bien la situation qui menace de plus en plus la santé publique au Brésil.

C'est particulièrement vrai à Rio Grande do Sul (RS), où les travailleurs du secteur sont représentés par la Fédération des travailleurs hospitaliers du Rio Grande do Sul (Federação dos Empregados em Estabelecimentos de Saúde do Rio Grande do Sul – FEESSERS).

Au Brésil, le gouvernement qui a accédé au pouvoir sur un véritable « coup d'état » politique est engagé dans une campagne de réduction des droits sociaux. Il ne défend en rien le secteur public en général. Le Président Michel Temer a gelé les dépenses de santé pour les 20 prochaines années, prévoyant pour 2018 que la dépense maximale serait au même niveau que l'année précédente, plus l'inflation.

Ce sont les entreprises du secteur privé qui vont en bénéficier. Elles enregistrent déjà la signature de nouveaux clients pour leurs régimes d'assurance-maladie. Le public reste toutefois méfiant et le taux élevé de chômage (12,06 % dans le pays et 27,3 % dans la région RS) a poussé de nombreuses familles à s'affilier à nouveau au SUS.

Or, la campagne menée par le gouvernement pour démanteler le SUS fait que le service public ne sera pas en mesure de répondre aux attentes envers lui en raison de cet afflux.

Le ministre de la santé, Ricardos Barros, a appelé à « la création d'un Plan de santé plus populaire, qui compterait moins de services que ce que prévoit la couverture obligatoire minimum définie par l'Agence Nationale de Santé (ANS) et coûterait moins cher aux consommateurs, lesquels devraient par ailleurs participer financièrement au SUS. » Cela revient à privatiser le système de santé universel et signifie la fin de soins gratuits pour les Brésiliens.

Plus de 3000 établissements de santé privés (régimes d'assurance-maladie des banques, coopératives de médecins, coopératives de dentistes, programmes complémentaires, cliniques, laboratoires, etc.) sont enregistrés dans le Rio Grande do Sul.

Au Brésil, plus de 75 % de la population sont traités dans les « Santa Casas » ou d'autres hôpitaux philanthropes. L'administration de certains de ces hôpitaux et de centres de soins a été externalisée et confiée à quatre acteurs (quarteirizada).

Pendant que les plans de santé publics et établissements philanthropes, tels que les hôpitaux Santa Casa, sont tirés vers le bas, les établissements privés prolifèrent. En prenant ses fonctions en 2015 au poste de gouverneur du Rio Grande do Sul, José Ivo Sartori a suivi l'exemple donné par le gouvernement fédéral. Sa première mesure dans le domaine de la santé a consisté à annuler le programme d'incitations pour les hôpitaux (IHOSP) qui prévoyait des travaux dans les bâtiments, l'achat d'équipements et la modernisation des structures. Il a aussi repoussé le transfert de fonds fédéraux et de l'État.

Mesure à laquelle s'ajoute un facteur aggravant : le récent amendement de la loi 8080 de 1990 consacrée à l'organisation et au fonctionnement des services de santé. En 2015, la loi 13.097 est ainsi venue amender celle de 1990 pour autoriser la gestion et l'achat d'hôpitaux en général, dont des établissements philanthropes, par des capitaux étrangers.         

En plus de permettre à des groupes internationaux d'entrer dans le secteur privé de la santé, cet amendement a ouvert la voie à une privatisation de grande ampleur et sans précédent du secteur philanthropique. La synergie qui nait de ces deux éléments de la nouvelle loi accélèrent la commercialisation de la santé.

Certains hôpitaux philanthropiques ont été achetés, ce qui a produit un effet boule de neige. Les conditions de travail se sont détériorées pour les professionnels de santé. Les employeurs ont accru la pression et licencié du personnel, mais les objectifs de « productivité » sont restés les mêmes, avec simplement moins de travailleurs.

Les financements ont été réduits et les administrateurs ont commencé à retarder le paiement des salaires (dans certains cas, il existait déjà des arriérés de salaires), à ne plus payer les congés, ni le salaire du 13e mois, ni les charges de sécurité sociale (ex. FGTS). Les managers ont entrepris par ailleurs de harceler systématiquement les travailleurs et de mettre à mal les standards professionnels.

De plus, les établissements ont commencé à réduire le nombre de lits, à supprimer les postes vacants aux admissions, les centres de santé, les test médicaux complexes, les opérations non obligatoires et même à fermer des unités de soins intensifs en néonatalogie. Comment les travailleurs du secteur de la santé s'en sortent-ils dans cette tourmente ? Ils doivent faire face à un niveau croissant de harcèlement et à une rupture de leur vie familiale et personnelle. Pourtant ils font de leur mieux pour faire le travail et assurer leur mission auprès de la population.

Ce ne sont pas les actions qui manquent. Mais le gouverneur José Ivo Sartori n'a jamais pris la peine de rencontrer les travailleurs et d'écouter ce qu'ils ont à dire sur la crise qui les secoue. Les syndicats ont organisé de nombreuses réunions, dont certaines avec des organisations patronales. Ils ont également favorisé la création de forums de discussion au Parlement, organisé des marches, distribué des livrets d'explication pour mieux comprendre la situation et appelé à la grève. Rien n'a fait réagir le gouverneur. Le résultat, c'est que plus de 100 000 professionnels de santé vivent dans l'incertitude.

La suppression de services publics et philanthropiques fait partie d'une stratégie de privatisation des hôpitaux. Malgré la crise économique et politique qui sévit actuellement au Brésil, des groupes privés internationaux tels que United Health/Amil et Rede D'or augmentent nettement leurs investissements dans le pays. Ils préparent ainsi le démantèlement du système de santé national universel, le SUS.

Telle est la triste réalité du Brésil et de Rio Grande do Sul. Les perspectives ne sont pas encourageantes pour les quelques années qui viennent mais FEESSERS et les syndicats qui y sont affiliés resteront aux côté des travailleurs et de la population en général. Nous allons appeler les autorités à prendre en compte les droits des travailleurs et à les respecter, donc à payer les salaires et les cotisations d'assurance nationale dans les délais. Et nous ne dévierons pas de notre exigence première qui consiste à assurer la santé pour tous au Brésil.

Par Milton Kempfer, Président de la Federação dos Empregados em Estabelecimentos de Saúde do Rio Grande do Sul – FEESSERS

Cet article est extrait de Bulletin d’information « Droit à la Santé », numéro 02/2017. Abonnez-vous au bulletin. Envoyez-nous vos articles.

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