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Des défenseurs de la justice de l'eau se réunissent à Tunis

16 Avril 2013
PSI at the WSF water democracy workshop
Le réseau de défenseurs de la justice de l’eau s’est réuni à Tunis afin d’intensifier la collaboration internationale et soutenir les activistes locaux. Une réunion s’est tenue durant six heures en amont du lancement du Forum le 25 mars, et plusieurs réunions ont eu lieu dans le cadre du programme officiel du FSM.

Le mouvement pour la justice de l’eau poursuit ses efforts afin d’intégrer les nouvelles problématiques et tendances ; citons par exemple :

  • l’accaparement des terres et la mainmise sur l’eau
  • la pollution, y compris par les industries extractives (exploitation minière, pétrole, fracturation du gaz de schiste, etc.)
  • l’eau destinée à l’agriculture (agro-industrie contre petits exploitants)
  • la financiarisation des ressources naturelles, eau comprise
  • le changement climatique, l’économie verte
  • l’infrastructure massive, y compris les barrages et l’interconnexion des rivières
  • le système des Nations Unies, les Objectifs en matière de développement durable, etc.

Les activistes ont évoqué des exemples d’enjeux, de campagnes et de victoires.  Le mouvement de résistance aux projets de méga-barrages et d’interconnexion de rivières en Inde a recouru à de nombreuses tactiques non violentes.  L’incursion actuelle des investisseurs privés en Inde suscite de nouveaux modèles de résistance, en ce compris les recours juridiques, la convocation de tribunaux présidés par d’éminentes personnalités (en retraite), etc.  

Plusieurs recommandations ont été formulées lors de ces réunions :  

  • Établir une base théorique commune pour ériger l’eau au rang de ressource commune, en se basant sur l’expérience des activistes et non sur une expérience purement juridique et/ou académique. La Résolution des Nations Unies de juillet 2010 sur le droit à l’eau ne suffit pas, elle est cooptée au sein de certaines entreprises et minée par plusieurs gouvernements (Canada, États-Unis, Australie, Japon, etc.).  Les activistes doivent  s’adapter à cette réalité – y compris dans le cadre de leur démarche de soutien aux programmes nationaux de mise en œuvre.  
  • Évaluer une approche appropriée des Nations Unies, toujours plus plébiscitée par les entreprises.  Il a été proposé de créer une autorité mondiale distincte compétente sur les questions relatives à l’eau, mais sans parvenir à aucun consensus, et en se heurtant à de nombreux écueils.  À cet égard, il est proposé d’envisager le Comité de la sécurité alimentaire mondiale de la FAO comme un mécanisme axé davantage sur la participation.  
  • Appuyer les stratégies de protection des sources hydriques, à l’instar de la démarche opérée à New York (protection des réservoirs) ou Paris (collaboration avec des agriculteurs afin d’atténuer le recours aux engrais et pesticides et promotion de l’agriculture biologique).
  • Tenter de mettre en place un fonds international dédié à l’eau, en faisant éventuellement appel au « crowdfunding »  (proposition suggérée par le mouvement grec qui cherche à lever des fonds pour prendre possession du service de distribution d’eau de Thessalonique, dans le cadre de la démarche de privatisation imposée par la Troïka).  Identifier d’autres mécanismes de financement comme alternatives au secteur privé.
  • Soutenir des campagnes spécifiques ayant des implications plus vastes, à l’image de l’eau en Palestine ; des privatisations en Grèce et en Tunisie ; de la remunicipalisation au Chili (et de la lutte contre l’utilisation des politiques néolibérales adoptées au Chili à titre de modèle pour l’ensemble du secteur), etc.  
  • Aller au-delà de la privatisation pour inclure la financiarisation (propositions de l’économie verte concernant les services écosystémiques, etc.),  en lien avec le système des Nations Unies, les Objectifs en matière de développement durable, qui seront largement influencés par le PNUE, encourageant l’approche des services écosystémiques.  
  • Assurer un développement dépassant les entreprises de service public qui témoignent déjà leur soutien, pour gagner les villes et leurs représentants élus et nommés.

Enjeux en cours :

  • privatisation, y compris dans le cadre des mesures d’austérité récemment adoptées
  • partenariats public-public à titre de politique alternative
  • remunicipalisation des concessions privées.

Le travail sur la privatisation est bien ancré mais requiert une vigilance constante pour s’étendre à de nouveaux partenaires, compte tenu de la dynamique changeante.  Les programmes d’austérité initiés dans nombre de pays sont un prétexte idéal pour les investisseurs privés, notamment en raison des pressions croissantes exercées sur les budgets municipaux.  Outre Suez et Veolia, de nouvelles entreprises font leur apparition, essentiellement issues du secteur national et local de la construction, comme c’est le cas au Brésil.  Les sociétés de capital privé ne connaissent pas une forte expansion mais elles restent à surveiller.  L’entreprise chinoise Beijing Enterprises Water Group  a récemment fait l’acquisition de la filiale portugaise de Veolia, marquant ainsi la première incursion chinoise sur le marché mondial de l’eau.  Dans le cadre de la PSI, nous devons améliorer notre capacité à avertir en temps utile des politiques de privatisation.

Ridha Fourti, membre de l’affilié tunisien UGTT représentant les travailleurs de la Société Nationale d’Exploitation et de Distribution des Eaux (SONEDE), a expliqué quels étaient les enjeux auxquels ils étaient confrontés, en ce compris les tentatives de privatisation françaises (blocage récemment), et les récentes propositions de construction d’une usine de dessalement dont la propriété et la gestion relèveraient des pouvoirs publics - plutôt que de la placer d’emblée aux mains d’investisseurs privés.  La Tunisie est en proie au stress hydrique et sera bientôt incapable de satisfaire aux besoins en eau de toute sa population, et ce même en ayant mis en place un mode de gestion dernier cri.  

Fourti a également insisté sur les dynamiques politiques opérées durant les deux années qui ont suivi la révolution, et les défis consécutifs posés aux syndicats ainsi qu’aux activistes de la société civile.  Il ne fait aucun doute que le gouvernement soutient des politiques néolibérales.  Les organisations de la société civile ont souffert sous la précédente administration, qui a considérablement restreint l’activité politique.  L’existence des syndicats a également été compromise mais a pu être maintenue grâce à leur présence sur le lieu de travail.  Le parti politique Ennahda tente désormais de placer ses membres à tous les postes administratifs auxquels ils peuvent prétendre, ce qui signifie que les personnes à la tête des services publics sont des responsables politiques.  Il tente même de proposer la candidature de certains de ses membres aux élections syndicales, obligeant l’UGTT à adopter une attitude défensive.  

Une réunion a mis l’accent sur la collaboration entre les syndicats et les activistes de la société civile.  Diverses expériences, aussi bonnes que mauvaises, ont été exposées, révélant les importantes divergences en termes d’histoire politique et de culture au niveau national.  Tous ont convenu que l’alliance entre les syndicats et la société civile avait débouché sur de nombreux résultats essentiels et représentait l’une des clés du travail à l’avenir. 

 

 

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