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Déclaration de la PSI sur la 9e Conférence ministérielle de l'OMC

27 Novembre, 2013
Source: 
PSI
Ces décennies de mondialisation dirigée par les entreprises affichent des résultats évidents dans la majeure partie du monde. Des millions de personnes sont toujours condamnées au chômage, et particulièrement les jeunes des quatre coins de la planète. Les inégalités se creusent et les droits des travailleurs/euses, ainsi que les services publics de qualité, sont mis à mal. Sur les marchés des matières premières, la libéralisation et la spéculation financière ont entraîné des fluctuations dévastatrices des prix des produits alimentaires, ainsi que des pénuries causant des dommages indescriptibles et des pertes de vies humaines qui pourraient être évitées. Si la crise économique mondiale provoquée par les actes irresponsables et non réglementés des marchés financiers privés est à l'origine d'une incommensurable souffrance des travailleurs/euses, elle est en outre à présent utilisée pour justifier la mise en œuvre de programmes d'austérité punitifs et peu judicieux.

La libéralisation des échanges a occasionné de nombreux dommages, sans relever les défis fondamentaux de notre époque. Les marchés sont restés les bras croisés face au changement climatique et, dans de nombreux cas, la privatisation a même contribué à des catastrophes écologiques. Le développement demeure au point mort dans de trop nombreux pays. La grande majorité de la population mondiale n'a pas droit à une protection sociale universelle, ni à un travail et à un salaire décents. Ne respectant pas les normes de la structure tripartite de l’Organisation internationale du Travail, les accords commerciaux poussent à la circulation non réglementée des travailleurs/euses migrant(e)s, tout en mettant à mal les institutions qui pourraient protéger ces travailleurs/euses de l’exploitation.

Le fléau de la corruption continue de sévir dans nos communautés, d’affaiblir la confiance envers les gouvernements et de détourner les ressources qui permettraient de garantir les besoins fondamentaux de nombreuses personnes. La majorité de la population mondiale n'a pas accès à des énergies et une eau publiques à la fois propres, abordables et fiables. Pour couronner le tout, les programmes en matière d'échanges commerciaux ne prennent aucune mesure pour amener à une nouvelle régulation des marchés financiers et empêcher cette élite restreinte de tirer un énorme profit du système tout en déstabilisant l'économie mondiale.

Et pourtant, il n'a jamais autant été possible de fournir aux communautés un accès universel à des services publics de qualité. Si le chiffre d'affaires des entreprises ne cesse de croître, les règles fiscales – affaiblies ou obsolètes – ne sont pas en mesure de s’emparer des revenus générés par les entreprises en vue de financer les services publics vitaux tels que la santé, l'éducation, la gestion des déchets, l'eau et l’énergie. Les multinationales qui ont encouragé la libéralisation des échanges ne paient pas leur juste part d'impôts. En outre, le programme de libre-échange actuel ne fait rien pour arranger les choses.

Si la prolifération des accords de libre-échange peut apporter des bénéfices nets aux sociétés et aux nations les plus puissantes, ces bénéfices ne sont pas distribués et parviennent rarement à ceux qui en ont le plus besoin, une situation qui vient exacerber les inégalités. Même l'OMC reconnaît à contrecœur qu'il y a, dans le libre-échange, des gagnants et des perdants.

 La nouvelle génération d'accords commerciaux n’a plus rien à voir avec les droits de douane. Ces accords visent plutôt à permettre aux grandes entreprises d’accéder aux marchés, avec le moins de restrictions possible. En réalité, cette nouvelle génération d'accords commerciaux empêche les gouvernements démocratiquement élus de défendre les normes environnementales, sociales et du travail susceptibles de mettre des bâtons dans les roues des entreprises. Ces accords cherchent à restreindre la protection des travailleurs/euses migrant(e)s, en autorisant qu’ils soient traité(e)s de façon immorale, comme de vulgaires marchandises que l'on peut acheter ou vendre sur le libre marché. Honteusement, les négociateurs de ces accords ne tirent pas les leçons de la crise financière et cherchent précisément à interdire la régulation financière nécessaire pour que les marchés des capitaux ne puissent plus jamais déstabiliser l'économie. Cette tendance qui consiste à ce que les entreprises puissent jouir de droits supérieurs à ceux des citoyen(ne)s et des nations, particulièrement ceux applicables par les tribunaux privés, est plus que scandaleuse.

Pour revêtir une certaine légitimité aux yeux de la majorité, le commerce mondial doit aller de pair avec la garantie d’un droit universel au développement humain.

Ce cadre doit être ouvert, équilibré et inclusif. Les membres de l'OMC doivent faire un premier pas en exécutant le mandat de développement, octroyé à l'OMC à Doha.

Les services publics servent le bien public
Les services publics n'ont pas leur place dans des accords commerciaux axés sur les mécanismes du marché et sur des prestations à but lucratif. Les services publics de qualité ont un caractère dynamique et s’adaptent aux avancées technologiques, ainsi qu’à l’évolution du contexte, des priorités politiques et des objectifs sociaux. Pour pouvoir fournir des services publics de qualité, les gouvernements doivent disposer d'une marge de manœuvre politique maximale, ainsi que de tous les outils de réglementations possibles et imaginables. Les modèles combinés public/privé ne font qu'accroître le besoin d'une marge politique et ne peuvent soutenir l'inclusion. Les services publics au sens large doivent être exclus de tout accord commercial.

Les gouvernements doivent être à même de réglementer les services essentiels
Les règles existantes de l'Accord général sur le commerce des services (AGCS) ne doivent pas favoriser une libéralisation. Les règles de l'AGCS relatives à l'accès au marché interdisent les réglementations servant l'intérêt public qui s'appliquent aussi bien aux entreprises nationales qu'étrangères, en vue de promouvoir la stabilité financière, la sécurité des consommateurs, la santé publique, la qualité de l'environnement et l'accès universel aux services d'éducation, d'eau, d'énergie et de transport. L'AGCS impose des limites supplémentaires aux réglementations nationales relatives aux prescriptions et procédures en matière de qualification, aux normes techniques et aux prescriptions liées aux licences. Les futurs accords, tels que l'Accord sur le commerce des services (ACS), ne doivent pas renforcer davantage les exigences en matière de dérégulation déjà présentes dans l'AGCS, mais plutôt faire marche arrière.

Oui aux soins de santé et aux médicaments abordables, non aux monopoles de brevets
La Déclaration de Doha sur l'accord sur les ADPIC (aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce) et la santé publique réaffirme les flexibilités prévues dans l'accord sur les ADPIC et leur utilisation pour répondre aux besoins en matière de santé publique des pays membres de l'OMC. Cependant, les négociations qui ont suivi cette Déclaration se sont clôturées sans adoption d’un mécanisme pratique permettant de traduire ces droits en un accès réel. Les États membres doivent revoir la décision du 30 août 2003 sur la dérogation à l'article 31 f) de l'Accord sur les ADPIC, ainsi que l'amendement des dispositions de l'Accord, en 2005, et améliorer ces décisions pour les rendre réalisables. Les membres doivent accepter un moratoire permanent sur les plaintes en situation de non-violation dans le cadre de l'Accord sur les ADPIC et veiller à garantir une dérogation permanente des obligations aux pays les moins avancés en vertu de l'Accord sur les ADPIC, sans aucune condition.

La stabilité financière, pas la déréglementation financière
Les règles de l’OMC sur la déréglementation et la libéralisation dans le secteur des services financiers ont véritablement préparé le terrain pour la crise financière mondiale. Pourtant, alors que le G20, la plupart des gouvernements, et même le FMI, ont reconnu la nécessité de réglementer à nouveau le secteur financier, les règles de l'AGCS de l'OMC viennent entraver ces efforts de réglementation. Les propositions actuelles émanant des négociations sur l'AGCS fixeraient des limites supplémentaires à la réglementation intérieure et étendraient les exigences de déréglementation. Il faut modifier sans tarder l'AGCS actuel dans le domaine de la réglementation des services financiers. En outre, aucune déréglementation ou libéralisation supplémentaire des services financiers ne devrait être entreprise par l’OMC. Les règles existantes de l'AGCS, ainsi que celles proposées, doivent être réexaminées à la lumière de la crise financière, puis clarifiées afin de garantir à tous les pays une marge politique suffisante pour la prise de mesures macroprudentielles – telles que les contrôles des capitaux et les taxes sur les transactions financières – et la mise en œuvre d'autres réglementations financières et mesures de prudence.

Des règles commerciales qui soutiennent le droit à l’alimentation
La nourriture représente bien plus qu’une simple marchandise. Chaque être humain a droit à une alimentation nutritive, saine et suffisante. La déréglementation et la libéralisation accrues des marchés des denrées alimentaires ont exposé les petits agriculteurs, les travailleurs et les consommateurs à des fluctuations inacceptables des prix et de la disponibilité des aliments, qui ont des effets dévastateurs sur les personnes les plus défavorisées de la planète. La spéculation excessive sur les marchés des matières premières et les règles alimentaires mondiales (majoritairement adoptées pour satisfaire les firmes agroalimentaires) qui traitent les aliments comme des produits servant les intérêts des entreprises, sont inacceptables. Les pays en développement doivent avoir le droit de subventionner l'alimentation pour les plus défavorisés, y compris en octroyant directement des subventions aux agriculteurs les plus pauvres, comme cela a été proposé par le G33 dans les négociations toujours en cours visant à promouvoir la sécurité alimentaire. Ils doivent également avoir le droit de relever les tarifs douaniers et d'utiliser d'autres mesures en vue de protéger les moyens de subsistance des agriculteurs, le développement rural et la sécurité alimentaire par l’intermédiaire d’une forme assouplie du mécanisme de sauvegarde spéciale (MSS), actuellement proposé par l'OMC. Aucun engagement supplémentaire envers l'agriculture ne devrait être demandé aux PMA. Les règles commerciales doivent être modifiées en vue de promouvoir une réglementation appropriée des produits et d'empêcher ainsi la spéculation excessive et la volatilité sur les marchés mondiaux.

Les accords commerciaux ne doivent pas réglementer la migration des travailleurs/euses
Les travailleurs/euses ne sont pas des marchandises. Dès lors, leur mobilité ne devrait pas être régie par les accords commerciaux. Contrairement aux biens et services, les individus doivent pouvoir compter sur des institutions qui protègent leurs droits humains. Seul le processus normatif de la structure tripartite de l'Organisation internationale du Travail est compétent pour réglementer la migration des travailleurs/euses.

L'OMC n'est pas l'instance devant établir une politique sur le changement climatique
La libéralisation du commerce et l'expansion des marchés ne résolvent pas – et ne peuvent pas résoudre – le problème du changement climatique. Les principes du développement durable ne résident pas au cœur de l'OMC, et cette dernière ne devrait pas limiter la marge de manœuvre des autorités compétentes pour résoudre les problèmes liés au changement climatique. Les règles ADPIC doivent être modifiées en vue de permettre aux pays de négocier des flexibilités supplémentaires pour le régime de propriété intellectuelle en ce qui concerne le transfert de technologie, y compris dans d'autres instances multilatérales traitant du changement climatique. Les politiques relatives au changement climatique ne doivent pas être contestées par le mécanisme de règlement des différends de l’OMC. Aucun nouveau programme sur le « changement climatique » ne doit être introduit à l’OMC.

Pas de libre-échange sans syndicats indépendants et sans droits fondamentaux du travail
Le droit de constituer des syndicats indépendants et d'y adhérer, tout comme le droit à la négociation collective et le droit de grève, sont des droits humains. Certains pays, poussés par des intérêts corporatistes, mettent parfois à mal ces droits dans le but d'obtenir un avantage concurrentiel. Lorsque des pays violent les droits fondamentaux du travail et les droits humains, il n'y a plus de « règles du jeu équitables ». Ces pays ne devraient plus pouvoir bénéficier de tout accord de libre-échange tant que ces violations perdurent.

Le commerce doit servir le développement
Les pays en développement doivent pouvoir utiliser les échanges commerciaux dans un objectif de développement. Le commerce n'est pas un but en soi. Si, en vertu des règles actuelles ou proposées, le commerce vient entraver la capacité des populations défavorisées et des pays pauvres à se développer, de nouvelles règles s’avèrent alors plus que nécessaires. Les membres de l'OMC doivent conclure un accord répondant aux 88 propositions formulées plus tôt dans les négociations afin de renforcer le fonctionnement et l’efficacité des principes du traitement spécial et différencié, de simplifier les règles d'origine de façon à améliorer l'accès aux marchés des pays développés, d’offrir un accès unilatéral avec franchise de droits et de quotas pour tous les produits des PMA, de supprimer toutes les subventions au coton et de prolonger indéfiniment la dérogation sur les services dont bénéficient actuellement les pays les moins développés.

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